L’homme et l’animal : les différences brouillées
Vous avez déjà vu des défilés de mode pour chiens et chats ? La chose devient fréquente à la télévision. Les « toutous » se dandinent vêtus de manteaux, de pulls, de sweets, de chaussettes, et même de bonnets, voire de lunettes de soleil. C’est chatoyant, coloré et gai. Leurs maîtres ou maîtresses sont fiers, et ils leur parlent comme à des gamins. Il paraît qu’ils échangent et se comprennent. Les animaux sont désormais déclarés « intelligents autant que nous, et même plus que nous. » Ils bénéficient de produits diététiques de qualité, d’une nourriture équilibrée et bio. Les dépenses en soins vétérinaires explosent. Déjà, des cimetières pour chiens et chats existent. Des rites du souvenir se mettent en place.
On ne se plaindra pas d’une plus grande sensibilité à la souffrance animale. Si les spectacles cruels de certains abattoirs, d’élevages en batteries, ou d’abandons d’animaux domestiques, sur les aires de repos, pendant ces vacances d’été, venaient à disparaître, ce serait un progrès. Mais de là à dissoudre toute différence entre l’humain et l’animal, il y a une marge que de nombreux théoriciens franchissent désormais. Il n’est pas rare de trouver des études qui montrent qu’il n’y a que 1% de différence génétique entre le chimpanzé et l’homme, et 20% avec la souris. On assure que la conscience, la pensée, l’émotion, le langage, l’art…ne doivent plus être considérés comme « le propre de l’homme », et que tout cela existe chez les animaux. Bref, à force de tirer l’homme vers l’animalité et l’animal vers l’humain, on dissout toute différence.
Certes, nous devons être plus rigoureux quant à nos responsabilités envers les animaux. Mais jusqu’à preuve du contraire, avec le philosophe Jean-Jacques Rousseau (17e s.), je tiens à la différence essentielle entre ces deux ordres. Elle consiste, pour l’homme, dans la « faculté de progresser. » Tandis que l’animal est ce qu’il doit être toute sa vie en quelques mois et selon son espèce, les progrès humains sont sans limites connues, et cumulatifs d’une génération sur l’autre. C’est ce que les « transhumanistes » développent à l’excès en faisant de l’homme un dieu quasi tout puissant. Savourons de n’être ni des dieux ni des animaux.
Note : pour approfondir, on pourra lire « Trois utopies contemporaines » de Francis Wolf – Edition Fayard